Réponse à une lettre jamais écrite

Cher X, Chère X

Que d'émotions… Je réponds à ta lettre, qui n’a jamais existé dans la réalité matérielle. Mais elle m’a touché et je t'en remercie ! Je me suis tellement reconnue dans tes mots, dans les vibrations de ces non-mots, de cet enfermement ! Je suis comme toi ou je l'ai été, je me soigne depuis ma prise de conscience. Je m'enfermais dans ma bulle, je disais que je me mettais aux abonnés absents et je vivais en regardant la vie à travers une bulle : les choses m'arrivaient de loin, je regardais vivre mes enfants à distance, leurs rires m'atteignaient avec un certain décalage à travers le prisme de mes persiennes. Et plus je m'enfermais plus j'avais du mal à en sortir ! Et plus je m'en voulais de ce comportement : dans leurs yeux il y avait tellement d'incompréhension ...

C'est tellement facile de se couper du monde - le mot facile ne convient pas - C'est une solution de protection pour ne pas sombrer et il se crée un certain automatisme, comme les tortues dès qu'elles sont touchées, même du bout des doigts, elles rentrent leurs têtes et tout ce qui dépasse dans leurs carapaces - et il faut de plus en plus de temps pour en sortir.

Et un jour...parce que c'était vital, j’ai senti qu'il me fallait choisir entre ma vie et ma mort. Ayant, enfin, compris que j'étais l'artisane de mon sale malheur comme de mon propre bonheur : je ne peux attendre de personne qu'elle me rende heureuse. Je ne peux rendre personne heureuse sauf si elle veut être heureuse à mes côtés. C’est possible que l’autre se ressente heureuse si je le suis moi-même, profondément, heureuse de vivre, de respirer, d'être sur cette terre aujourd'hui, ici et maintenant et de le partager.

Accepter que je fusse à ma juste place et que ces années difficiles, malheureuses aient été des leçons de vie, dures leçons mais tellement importantes, tellement fondatrices de qui je suis aujourd'hui !

Je remercie cet homme de m'avoir appris la vie à travers ce que nous avons partagé; je le remercie de m'avoir permis d'aller chercher en moi la force de relever la tête et de dire : NON!

De prendre en main mes propres besoins au lieu de m'échiner à vouloir rendre un autre heureux . En fin de compte, son besoin ne correspondait pas avec mes attentes d'une vie commune, ou ce que j'avais mis dedans et mon besoin ne correspondait pas au sien.

C'est quelqu'un de bien, c'est évident, mais pas avec moi... je suis quelqu'un de bien mais pas pour lui donc merci pour tout mais pas ensemble. Et ma seule obligation est celle de me rendre heureuse afin que je puisse rejaillir sur mes proches, sur ceux que j’aime de tout mon être.

Je suis heureuse et profondément car aimer c'est aussi accepter que l'autre puisse être heureux en dehors de nous.

Aimer l'autre n'est pas enfermer cet amour dans une cage mais avoir la main ouverte, la cage inexistante et le cœur en joie de tout ce qu'il peut vivre libre d'être lui, libre de partager avec moi, libre de m’aimer, de ne pas m'aimer... de rester, de s'en aller...

Chaque jour qui passe, je remercie la vie et chaque matin qui se lève, est une célébration de cette vie ... je ne suis pas angélique, des gros cailloux dans mes chaussures me font très mal parfois, souvent même mais je vais y chercher ce positif qu'ils veulent m'apprendre et j'y trouve de superbes leçons de vie.

J'ai accepté d'être et de laisser exprimer ma sensibilité, de pleurer en regardant Bambi, en écoutant une belle musique, de rire aux larmes auprès de mes amis, de sourire aux parfaits inconnus dans la rue parce que le soleil me chauffe la couenne, parce que c'est bon d'être tout simplement vivant.

Le bonheur est une flamme en soi qui, quelquefois, est profondément enfouie sous des tonnes et des tonnes de soucis, d'épreuves de la vie quotidienne mais elle est là en chacun de nous !

Il parait que je suis une "naïve idéaliste" qui ne voit que le bon côté des choses, qui peint sa vie en rose. Oui, certes, mais je vois aussi le reste mais je ne m'y arrête pas, je n'en prends que ce qui me fait avancer, mûrir, continuer mon chemin...

Et si sur ce chemin, je recroise un être qui a compris qu’il est seul artisan de son bonheur et que nous serons des "valeurs ajoutées" l'un pour l'autre, alors oui je marcherai à ces côtés.

En attendant, je vis profondément, intensément chaque instant de cette vie, la mienne dans ses hauts et ses bas...quand je suis en bas, je m'aime, je me chouchoute et me fais du bien ! Je goûterai à chaque goutte de vie qui me sera présentée parce que je suis là pour expérimenter la vie.

Merci, X, de m'avoir lu avec ta bienveillance habituelle.

Asha